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SIEG : les compagnies low-cost EasyJet, Volotea et Germanwings devront rembourser l’Italie

Affaires - Droit économique
Public - Droit public des affaires
05/06/2020
Par trois décisions du 13 mai 2020, le Tribunal de l’Union européenne a confirmé la condamnation de l'Italie à récupérer les aides versées aux compagnies aériennes EasyJet, Volotea et Gerwanwings.
Ces trois affaires concernent un dispositif mis en place en Italie par une loi régionale visant à développer le tourisme en Sardaigne. Cette loi prévoyait le remboursement par la région Sardaigne des sommes engagées par les exploitants aéroportuaires au titre des contrats passés avec des compagnies aériennes pour des actions marketing.

Il convient de préciser d’emblée que ce dispositif avait été notifié par l’Italie à la Commission européenne mais avait été mis en œuvre avant de recevoir son autorisation. En conséquence, la simple qualification du dispositif litigieux d’aide d’État impliquait son illégalité et une condamnation à récupérer l’aide octroyée.

Plusieurs questions se posaient ici quant à la qualification d’aide d’État. Il s’agissait, en premier lieu, de savoir si les sommes versées par les exploitants aéroportuaires pouvaient être qualifiées de « ressources d’État » et qui étaient les bénéficiaires du régime d’aide litigieux. En second lieu, il s’agissait de vérifier si la région Sardaigne ou les exploitants aéroportuaires avaient agi en opérateur privé en économie de marché.

Ainsi, en ce qui concerne la détermination des bénéficiaires, la Commission européenne était parvenue, dans sa décision du 29 juillet 2016, à la conclusion que les fonds versés par la région Sardaigne constituaient des aides d’État et que les exploitants aéroportuaires n’étaient que des intermédiaires et que les réels bénéficiaires étaient les compagnies aériennes. Elle a été suivie dans ce raisonnement par le Tribunal de l’Union européenne.

Il a, sur ce point, relevé que la loi régionale prévoyait un mécanisme de financement des exploitants aéroportuaires conditionné à une utilisation précise des fonds octroyés, dans le but de promouvoir la région Sardaigne. Le Tribunal a également rappelé que, d’une part, les ressources d’État peuvent émaner d’une autorité infra-étatique, telle que la région Sardaigne, et, d’autre part, l’objectif commercial ou d’intérêt général du dispositif est sans importance sur la qualification d’aide d’État. Le Tribunal s’arrête en revanche, s’agissant d’aides indirectes, sur le niveau de contrôle de l’État sur l’octroi des fonds. Il a ici constaté que des instructions précises avaient été données par la région Sardaigne quant à l’utilisation des sommes (rémunération des compagnies aériennes pour différents services tels que l’ouverture de nouvelles liaisons aériennes, l’augmentation des fréquences, marketing, entre autres…). Le régime d’aide prévu par la loi régionale prévoyait un financement des exploitants aéroportuaires de la part de la région Sardaigne sur production de justificatifs des dépenses. Le Tribunal a donc pu déduire de ses éléments que la région Sardaigne avait bien été en mesure d’opérer un contrôle étroit sur l’octroi des fonds aux compagnies aériennes.

Il a donc confirmé que les exploitants aéroportuaires n’étaient que des intermédiaires et que les fonds alloués aux compagnies aériennes constituaient bien des ressources d'État.

Les compagnies aériennes prétendaient également que les exploitants aéroportuaires et la région Sardaigne avait agi en opérateur privé en économie de marché. Or, sur ce point le Tribunal a considéré que les exploitants aéroportuaires s’étaient contentés d’appliquer les instructions reçues de la part de la région Sardaigne, ce qui justifiait le refus de la Commission européenne d’examiner ce critère. En outre, l’objectif du régime d’aides étant le développement économique de la Sardaigne et non la recherche de bénéfices, il ne pouvait être considéré qu’elle ait agi en tant qu’investisseur privé.  

Les compagnies EasyJet et Volotea avaient également fait valoir que la décision de récupération ne respectait pas le principe de confiance légitime, ce à quoi le Tribunal a répondu qu’il ne pouvait être invoqué, du simple fait que le régime avait été mis en œuvre avant même d’avoir reçu l’autorisation de la Commission européenne, ce qui rendait l’aide illégale.

Le Tribunal a donc suivi la Commission en ce qu’elle concluait que le financement accordé par la région Sardaigne aux compagnies aériennes, via les exploitants aéroportuaires, avait conduit à octroyer à ces compagnies aériennes un avantage économique qu’elles n’auraient pu obtenir dans des conditions normales de marché.

Pour aller plus loin
Pour en savoir plus au sujet des aides d’État, voir le Lamy droit économique n° 2210 et s. et le Lamy droit public des affaires n° 774 et s.
Pour en savoir plus sur le critère de l’opérateur privé, voir le Lamy droit économique n° 2267 et s.
 
Source : Actualités du droit